Les Affaires: Julien Arsenault, Presse Canadienne
Alors que les joueurs des industries de l’aluminium et de l’acier sont frappés par des droits tarifaires aux États-Unis depuis maintenant près de trois semaines, Ottawa tente toujours de déterminer comment aider ces derniers.
Si la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, a assuré mercredi que le gouvernement Trudeau comptait défendre les travailleurs de ces deux secteurs, ceux-ci devront encore patienter avant de savoir comment.
«La manière exacte de ce soutien, nous sommes en train d’en discuter et c’est l’une des raisons pour lesquelles je suis ici», a-t-elle dit, en point de presse, en marge d’un événement organisé par le Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM).
Mme Freeland a ajouté qu’elle allait aborder le dossier dans le cadre de rencontres prévues plus tard dans la journée avec des représentants de ces industries. En début de journée, les tarifs ont également fait l’objet de discussions avec la ministre québécoise de l’Économie, Dominique Anglade.
«Nous comprenons l’importance de cette situation et je veux aussi donner en exemple le soutien que nous avons offert à l’industrie forestière», a rappelé la chef de la diplomatie canadienne, en référence à la dispute canado-américaine sur le bois d’oeuvre.
Elle n’est toutefois pas allée jusqu’à dire que l’aide qui serait offerte aux secteurs de l’aluminium et de l’acier serait identique à celle mise de l’avant dans le conflit du bois d’oeuvre.
Le 11 juin dernier, le gouvernement Couillard avait annoncé l’octroi d’une enveloppe de 100 millions $ en prêts et garanties de prêts destinée aux plus petits joueurs de l’industrie de l’aluminium et de l’acier. Québec se dit surtout préoccupé par les petites et moyennes entreprises spécialisées dans la transformation, qui n’ont pas toutes les reins suffisamment solides pour absorber les tarifs.
Actuellement, cinq dossiers d’entreprise sont analysés, a confirmé mercredi après-midi le ministère de l’Économie.
Déclarations positives
Mme Freeland a par ailleurs accueilli favorablement les déclarations du secrétaire américain au Commerce Wilbur Ross à l’effet que le Canada ne constituait pas une menace à la sécurité nationale des États-Unis.
Évoquant qu’un nouvel Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) pourrait faire disparaître les tarifs de l’administration Trump sur l’acier et l’aluminium, M. Ross a aussi reconnu que Washington n’affichait pas de déficit commercial avec Ottawa en ce qui a trait à l’acier _ et, en fait, qu’il présentait plutôt un excédent avec son voisin nordique au chapitre de la valeur en dollars de ces échanges.
Interrogée à ce sujet, la ministre Freeland a expliqué que les responsables canadiens avaient martelé ces messages dans la capitale américaine sur les questions entourant l’acier et la sécurité nationale.
«Nous estimons que c’est évident et c’est ce que nous affirmons depuis le début», a dit la ministre, qui a précisé ne pas avoir pris connaissance de l’ensemble des remarques formulées par M. Ross.
Alors qu’il témoignait devant un comité sénatorial à Washington, le secrétaire américain au Commerce a entendu les inquiétudes des élus quant aux menaces de représailles qu’envisagent d’appliquer certains alliés, dont le Canada, le Mexique et l’Union européenne.
Républicains et démocrates redoutent notamment des pertes d’emplois aux États-Unis et des hausses de prix pour les consommateurs.
Le président américain Donald Trump a imposé ces tarifs à certains de ses plus proches partenaires en faisant valoir qu’ils représentaient une menace à la sécurité nationale des États-Unis et en évoquant la section 232, particulièrement controversée, de la loi américaine sur le commerce.
Tarifs et ALÉNA
Lorsqu’il s’est fait demander en quoi l’industrie canadienne de l’acier représentait une menace à la sécurité nationale, M. Ross a répliqué que le Canada, en lui-même, ne représentait pas une menace.
Mais M. Ross a aussi lié les tarifs américains sur les importations d’acier et d’aluminium aux négociations en cours sur l’ALÉNA.
«Nous avions initialement exempté le Canada et le Mexique (de la catégorie de la sécurité nationale) alors que se poursuivaient les négociations générales de l’ALÉNA», a-t-il expliqué au sujet des négociations tripartites. «Malheureusement, ces discussions n’ont pu en venir à une conclusion.»
Le gouvernement Trudeau n’a jamais voulu lier ces deux dossiers.
À Montréal, Mme Freeland a réitéré que le dossier des tarifs américains, ainsi que la réplique canadienne à cette mesure, est indépendant des discussions entourant l’accord de libre-échange.